Gestion des Ressources Humaines

Quatre conseils que j’aurais aimé avoir dans mon premier rôle de gestionnaire

C’est mardi matin.

Tu viens de raccrocher avec ton employée, Julie, qui t’annonce qu’elle ne peut pas rentrer parce que la garderie de son garçon n’ouvre pas aujourd’hui – trop de cas de covid. Elle était supposée préparer la présentation pour le meeting de 14h, mais tu vas devoir t’en occuper à sa place.

Tu ne sais pas trop pourquoi, mais tu n’as même pas encore pris ton premier café et tu te sens déjà brûlé de ta semaine. Juste à regarder le calendrier de ta journée, l’angoisse te prend :

9h – Meeting Hebdo Marketing
10h – Rencontre de suivi des projets avec le big boss (pas eu le temps de préparer la rencontre)
11h – 1 on 1 avec Catherine, ton employée qui veut te dire qu’elle n’est plus capable de travailler avec Jean-Michel (pourtant ton plus performant? Qu’est-ce qui peut bien se passer entre ces deux-là ?)
11h30 – Vide (yé!) – tu le sais pas encore, mais tu vas passer 40 minutes au téléphone à écouter ton vendeur de la Rive-Sud qui n’en a plus qu’assez de l’équipe de production qui n’écoute pas ses recommandations.
12h00 – Formation sur la nouvelle procédure de sécurité de l’information (tout le monde est dans le jus, pas le choix de booker ça sur l’heure du dîner, tu mangeras pendant le meeting)
13h – Comité d’amélioration continue
14h – Meeting des ventes (dont la présentation n’est pas montée, on se souvient)
15h – Formation du nouvel employé sur la base de donnée client
16h – 1 on 1 avec Guy, ton employé 20 ans plus vieux que toi et qui ne fait que se plaindre de tous les changements dans l’entreprise chaque fois que tu t’assois avec.

Normalement, tu dois quitter à 16h30 pour aller chercher les enfants à la garderie, mais avec Guy, c’est toujours long, tu n’as aucune idée si tu vas être là à temps. Ça va te tourmenter l’esprit toute la journée.

Pourtant! Quand on t’a annoncé ta nomination comme gestionnaire, tu jubilais!

Gros step salarial, la reconnaissance de tes pairs, tes parents sont si fiers! Les patrons t’ont promis un horaire flexible, un beau bureau, de la confiance et surtout pas de microgestion! Bienvenue dans le rôle du gestionnaire de premier niveau! La belle vie commence!

La belle vie… right?

Disons que tu as eu droit à quelques surprises depuis ton entrée en poste il y a 3 mois.

Personne ne t’a expliqué comment faire la job. (Ta prédécesseur ayant quitté en burn-out)

Tu as l’impression de passer 90% de ton temps à faire de la psychologie avec tes employés – 10% de ton temps à faire ce que tu penses que tu devrais être en train de faire. (s’en suis un beau feeling d’être inadéquat et non performant)

Les formations, l’accompagnement et la reconnaissance ne font plus partie de ta vie. C’est toi le boss maintenant! Let’s go! Performe!

Ton patron? Quel patron? Jamais disponible, 0 temps à t’accorder, et encore moins à te fournir de la rétroaction.

Bon. On respire. On se calme. C’est une adaptation. C’est tout.

On ne t’a juste pas expliqué ce qui venait avec le rôle de gestionnaire. Ce qu’on n’explique pas (ou pas assez), même quand tu étudies en administration et que seule “l’école de l’expérience” va te montrer. Je te propose un “crash course” en ces quatre (4) conseils que j’aurais vraiment voulu avoir le jour où j’ai été nommé gestionnaire pour la première fois.

1. Si tu ne prends pas le contrôle de ton horaire, les autres vont le faire.

Ta première erreur (ne sois pas dure avec toi même, tu ne pouvais pas le savoir) a été de perdre le contrôle de ton calendrier.

La vie n’aime pas le vide, et tes collègues – qui ont accès à tes disponibilités dans le calendrier de l’entreprise – n’hésiteront jamais à remplir les plages horaires vides de réunions de toutes sortes.

TU DOIS prendre le contrôle de ton agenda et communiquer tes exigences aux gens qui sont susceptibles de remplir tes plages horaires. Par exemple, fixe du temps réservé seulement à toi entre 8h30 et 9h00, de 12h à 13h30 pour que tu puisses dîner et mets-toi indisponible à partir de 16h15 pour te donner le temps de terminer ta journée calmement.

Ne fais pas l’erreur de te dire que tu accompliras tes tâches entre les meetings. Inscris du temps à ton agenda pour tes tâches et fais preuve de discipline envers toi-même. Les autres vont s’ajuster en fonction de tes disponibilités.

Si tu passes ta journée dans le stress et l’impression de manquer de temps à chaque seconde, ton niveau de stress te handicape et sur le long terme, nuit à ta capacité de faire ton travail et SURTOUT, nuit à ta santé mentale (parles-en à ta prédécesseur).

2. Ta capacité à communiquer devient (a toujours été?) ton atout numéro un.

Un des effets les plus bénéfiques qu’une longue expérience en gestion m’a donné, c’est bien ma capacité à communiquer. Pas seulement au travail, mais dans mon couple, avec mes amis, avec mes proches, avec mes enfants.

Ce n’est pas compliqué, 100% de tes nouvelles tâches de gestion vont s’améliorer si tu perfectionnes tes compétences en communication. Tes choix de mots dans les courriels, ta façon de saluer tes collègues et employés le matin en rentrant, ton écoute pendant les rencontres avec ton équipe, la reconnaissance que tu donnes aux autres départements pour leur travail, ta façon de souhaiter bonne fête à tes employés. Par texto? En personne? Par courriel? Qui est-ce que je mets en copie? Dois-je faire “répondre à tous” dans tel contexte?

Il y a un paquet de littérature (et même un BAC à l’université) sur la communication alors je ne vais pas prétendre en faire le résumé complet dans cet article, mais voici ma vision, en tant que gestionnaire. La communication c’est:

Savoir écouter

Ouvrir tes oreilles pour de vrai, sans être en attente que ton interlocuteur prenne une pause pour qu’ enfin, tu puisses dire la phrase que tu as en tête.

Être précis dans son choix de mot

Les développeurs font toujours la même erreur? TOUJOURS? C’est vrai que c’est arrivé à trois reprises dernièrement, je vais adresser la situation à ma rencontre avec le chef de département ce jeudi, merci de ton feedback.

Être sincère dans ce que l’on dit

Si tu ne donnes pas l’heure juste et que tu n’es pas en mesure (par peur, ou manque de courage) de partager ce qui t’habite, tu mens. Mentir en tant que gestionnaire, c’est le début de la fin. Tu dois trouver la force de nommer les choses (le sous-point #2 va énormément t’aider ici)

Vouloir (VRAIMENT VOULOIR) comprendre la réalité de l’autre

Quand, à midi, ton vendeur de la Rive-Sud va t’appeler pour se plaindre de l’équipe de Prod, tu dois être en mesure de comprendre leur réalité pour bien être en mesure de donner de la perspective à ton équipe. Quand on n’est pas dans l’équipe de gestion, on n’a pas accès à toute l’information. L’effet pervers de ça, c’est de penser que les processus de l’entreprise tournent alentour de nous seulement.

Les meetings, ça sert – entre autres – à comprendre ce qui se passe dans les autres départements. Tu dois comprendre la réalité des autres parties prenantes de ton organisation si tu veux être en mesure de bien faire rouler ton équipe et mobiliser les gens derrière un objectif commun.

3. Tu dois comprendre et t’aligner à la culture de ton entreprise. C’est elle qui drive le show.

J’ai déjà travaillé pour une entreprise chez qui il était pratique courante d’arriver 5 à 10 minutes en retard aux meetings. Une autre, chez qui nous devions être présents 5 à 10 minutes avant le début de la rencontre pour permettre les échanges informels.

Les petits éléments culturels des pratiques de gestion de l’entreprise vont grandement impacter ton quotidien. Tu dois en être conscient et apprendre à soi vivre avec, soi évaluer ta capacité à influencer ces pratiques si elles sont néfastes (pas juste pour toi, mais pour tous), ou alors à “avaler ta pilule” et te demander si elle crée du ressentiment chez toi – auquel cas, il sera rapidement recommandable que tu quittes pour aller chez une entreprise avec un meilleur fit culturel.

La culture d’une entreprise, c’est dans son ADN, c’est extrêmement difficile à faire changer. C’est souvent – si tu travailles dans une PME – directement lié aux valeurs du propriétaire de l’entreprise. Il y a souvent un élément historique derrière. “On a toujours fait ça comme ça”, mais très subtile, parce que ça reste souvent dans le “non dit”. Ce sont les croyances, les attitudes de l’entreprise.

Tu devrais, en tant que nouveau gestionnaire, passer une bonne partie de tes premiers temps en gestion, à bien comprendre la culture de ton entreprise et ça, ça se fait souvent dans des moments informels, des discussions de corridor. Ça se fait dans le ressenti. Ça se fait en posant des questions ouvertes, en essayant de comprendre vraiment ce qui se passe. Ça va probablement te demander de l’intuition et du courage. Ça va te prendre du temps, et des oreilles bien ouvertes. Ça va te prendre de l’écoute.

“Écoute, et regarde ce qui se passe”: Quel conseil absolument primordial que trop peu de gestionnaires se font donner dès leur début! Ce n’est pas le temps d’être en mode solution, c’est le temps de comprendre comment les choses se font. Sois exigeant avec ton nouveau patron là-dessus. “Boss, j’accepte la job, mais j’aimerais que tu me laisses 90 jours avant de te fournir un plan d’action, car je dois prendre mes aises si je veux faire un bon travail. Je veux prendre le temps d’écouter”. (Tsé, quand je parlais de courage?)

4. Ne sous-estime JAMAIS l’impact que tu as sur les gens

Ta performance et tes compétences deviennent très orientées vers les soft skills quand tu deviens gestionnaire. Tu vas t’en rendre compte très rapidement. Ton savoir-faire devient de moins en moins important. C’est ton savoir-être qui va se mettre à briller.

Malheureusement, au Québec, encore beaucoup d’entreprises vont donner une promotion au plus ancien. Au plus performant de l’équipe, l’employé le plus dédié, le plus méticuleux dans son travail. Celui qui atteint ses objectifs. C’est bien beau tout ça, mais la réalité, c’est que les compétences attendues d’un gestionnaire, particulièrement au niveau humain, sont énormément plus complexes, nuancées et – j’oserais dire – plus importantes, sachant que le rôle du gestionnaire se fait avec les gens, bien avant de se faire avec les processus.

Tes belles performances ne t’appartiennent plus. Tu les as laissées derrière toi. Ta performance maintenant, c’est celle de ton équipe. Quand ton équipe a du succès, ça leur revient. Quand ton équipe échoue, tu en es le responsable. Tu fais partie de quelque chose de plus grand que toi, et tu dois le vivre avec humilité, avec sacrifice personnel. Ton égo n’a plus sa place et aujourd’hui tu réalises bien que ton rôle de gestionnaire a beaucoup plus les allures d’une charge que d’un privilège. Personne, sauf les gestionnaires, ne peut comprendre ceci.

Et c’est exactement la raison pour laquelle maintenant, ta vie n’est plus pareille. Tu gères du personnel, et ceci a un impact, même à l’extérieur de ton travail. Les gens te voient différemment. Ils se tournent vers toi pour des conseils et ton opinion a un poids différent.

Tes employés, dans certains cas, ont une relation très particulière avec toi. Dans quelques cas, c’est comme s’ils parlaient à leur propre parent. Dans d’autres, comme à leur psychologue. Si ça, ça n’est pas une lourde charge à porter, je me demande bien ce que c’est. Tu veux apprendre à devenir parent? Va gérer du personnel. Ça peut être lourd, mais c’est extrêmement gratifiant, si c’est ce que tu veux faire, évidemment. Tu dois savoir que c’est ce dans quoi tu t’embarques en allant gérer des êtres humains.

Ne sous-estime JAMAIS l’impact que tu auras à l’entour de toi, maintenant que tu es gestionnaire. Tu vas changer des vies.

C’est le plus beau métier du monde, mais c’est loin d’être facile. Tu dois, trop souvent, prendre ton développement en main. 

Lis, interroge-toi, va chercher des ressources, un mentor ou un coach. La bonne nouvelle, c’est que plusieurs compagnies offrent des budgets en développement professionnel et tu peux les investir dans tes compétences. Soluflex offre des solutions de ce genre alors n’hésite pas à nous contacter au besoin!

Bon succès à toi, nouveau gestionnaire!

Article rédigé par

Photo Carl consultation RH
Carl Deveau
Consultant RH – Soluflex Estrie

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